mercredi 31 août 2011

Le feuilleton du mercredi, 1 .

Avant que vous lisiez le texte, je tiens à préciser que ce feuilleton sera à deux voix. Vous avez déjà pu rencontrer celle d'Elizabeth la semaine dernière dans le préambule, aujourd'hui ce sera au tour de Louis. J'aime l'idée de voir le récit du point de vue des deux protagonistes principaux. 
Place au texte maintenant :)


Journal de Louis.

30 août.

Voilà, c’est fait. Encore une galère de plus. Sérieusement, il y a des jours où j’ai l’impression que la terre s’est liguée contre moi. Mon psy dirait que je souffre d’un sérieux complexe de persécution. Mais bon, il a des idées un peu décalées quand même. Comme ce journal, que je dois absolument tenir, parce qu’il paraît que ça va m’aider. Mouais. Un homme écrivant un journal ? A notre époque ? J’avais bien pensé faire un blog, mais j’aurais peur d’être ridicule et si jamais mes proches tombaient dessus... Déjà que je me sens con quand je dis que je vais voir un psy !
La journée a été harassante, et je n’ai pas pu avancer d’un iota sur mes pages. J’espère que je ne vais pas être en retard, sinon mon scénariste risque de me passer un savon. Et je parle même pas de l’éditeur. En même temps, je n’étais pas censé savoir qu’on aller me jeter à la porte de mon meublé, et que je me retrouverais chez une inconnue, bien trop joviale à mon goût, dans une chambre qui si elle est vaste et claire, me donne pour l’instant un sentiment de mal-être. Je n’ai pas encore réussi à me faire à l’idée que j’ai quitté mon cocon. Je suis très routinier comme garçon. Trop sans doute. Alors, déménager…
Quand je suis arrivé tout à l’heure à la librairie, j’étais tout à fait curieux de savoir à quoi ressemblait la fameuse Elizabeth Tales. Avec un nom pareil, digne d’une héroïne de roman, il y a de quoi s’attendre à une fille grandiose non ?
Son magasin est, je dois l’avouer, superbe, avec un grand rayon bande dessinée, bon point pour elle, et un côté très intimiste. Il y a quelques fauteuils par ci par là, qui invitent à s’attarder un peu. Je me suis assis, elle était occupée à lire à voix haute, à une dizaine de gens pendus à ses lèvres, un bouquin de format de poche. Je me suis rendu compte plus tard que c’était le Bonheur des dames de Zola.  Caché derrière une des nombreuses plantes vertes de l’endroit, j’ai pu l’observer à ma guise. Elle est assez jolie, bien que terriblement désuète dans sa façon de se coiffer, avec une tresse blonde collée à la tête, et dans son habillement tout en dentelles et couleurs passées .  On aurait pu croire qu’elle sortait d’une peinture intimiste dans un boudoir. Sans doute une volonté évidente de paraître fragile et donc de susciter chez le mâle un instinct de préservation. Ce ne sera clairement pas le cas chez moi.
Néanmoins, puisqu’il faut rendre à César ce qui lui appartient, elle a une façon de lire qui captive. Elle prend son temps, vous accroche à sa barque et sans même que vous vous en rendiez compte, vous voilà pris au piège. Elle m’a donné envie de l’acheter son livre. Ingénieux coup de marketing. Enfin je crois. J’ai des doutes que ce soit commercial, parce que malgré les apparences, à la fin de sa lecture, elle a prêté son exemplaire à une adolescente, clamé qu’il était sans doute trouvable en bibliothèque ou en lecture gratuite sur internet. Elle avait aussi des exemplaires d’occasion. Alors certes, certains de ses « adeptes », ont fait quelques achats, mais sans doute moins que si elle avait joué plus finement la chose.
Une drôle de vendeuse. Mais en même temps, le côté désintéressé peut amener une plus large clientèle. J’ai du mal à la cerner sur ce coup là.
Ce que j’ai bien compris par contre, c’est que c’est une intellectuelle. Elle vit lecture, respire lecture, mange lecture. Il faut voir son bureau. Une pièce comme on en voit dans les films, tapissée de bibliothèques, avec même une petite échelle pour atteindre les hauts rayonnages. Elle m’a dit que je pouvais me servir. Mais la lecture… Ce n’est plus vraiment ma tasse de thé, et ce depuis ce fameux jour…
Pendant que j’écris un de ses chats est assis sur le lit et me fixe en ronronnant. J’aime la compagnie des félins. Ils ont un côté rassurant. Leur compagnie sera toujours plus agréable en tout cas que celle de leur maîtresse, qui a déjà tenté de m’attirer dans ses filets amicaux en me proposant de manger avec elle. Comme si j’avais envie d’être son ami.
Je suis et resterais pour elle un locataire. Point barre. J’espère qu’elle ne se leurre pas là-dessus.

lundi 29 août 2011

Rendez vous avec un mot : passé

Cette semaine le mot n'était pas très compliqué, bien que chargé de sens.
Celui de la semaine prochaine à eu du mal à venir, je ne sais pas pourquoi mais le programme générateur de mots m'a donné tout un tas de choses très farfelues (lénacide, actinide, emmascaradé... Et j'en passe.) J'allais me décider à prendre un vrai dictionnaire, ou à demander un mot au hasard à quelqu'un, quand je suis tombée sur crime. Là, je me suis dit que c'était exploitable sans attraper de cheveux blancs. Allez faire un texte sur l'actinide, franchement !
Donc pour la semaine prochaine CRIME. Du sanglant ou pas, du polar au thriller, de la tragédie au macabre, j'espère que nous aurons de beaux textes, et n'en doute pas.
Cette semaine plus de participants qu'à l'ordinaire, ce qui me ravit fortement. Allez faire un tour chez Amélie (qui a fait d'une pierre de coup en mixant les plumes et ce rendez vous), Olivia32 Octobre et Aymeline.

Mon texte est pour une fois un "one shot" et n'appartient à aucune histoire en particulier. Il s'est juste imposé.


Assise en tailleur sur le tapis qui l’avait vue en partie grandir, elle laissait le soleil d’hiver la réchauffer un peu, regrettant qu’il ne puisse pas dissiper le nuage qui l’avait emplie.
Elle était là, seule, perdue, dans cette maison si froide que son souffle créait des volutes dans l’air.
Etalées devant elle, des piles de lettres, photos, souvenirs, ayant appartenu à son grand père. Le vieil homme venait de mourir, sans qu’elle puisse lui dire un dernier au revoir, sans qu’elle le remercie encore une fois d’avoir été si présent dans sa vie. Il était mort seul. Luttant contre le sanglot qui naissait dans sa gorge, elle monta un peu le volume de son baladeur mp3, se laissant emplir par les sons de la nature, artificiels mais si rassurants. On la taxait souvent de bizarre quand elle avouait qu’elle écoutait bien souvent ce genre de « musique ». C’était sa méthode de relaxation à elle, qui marchait quand elle le voulait bien.
Alors que dans ses oreilles l’orage se mettait à gronder, elle arrêta sa main sur la photo d’une femme, probablement prise dans les années 1970. Son sourire semblait déborder du cadre de la photo, et emplir la pièce. Elle était belle, plutôt petite, ronde, à la bouche pleine et aux grand yeux ourlés. Elle avait été immortalisée au bord de la mer, et elle regardait comme fascinée, les vagues se briser sur ses pieds.
Qui pouvait bien être cette femme ? Elle retourna la photo.
Marie, 1972.
Autant qu’elle s’en souvienne, on ne lui avait jamais parlé d’une Marie parmi les amis de ses grands-parents, qu’elle avait de plus côtoyés en étant enfant.
Elle jeta un regard vers son téléphone, se demandant si c’était bien la peine de déranger sa mère pour ça. Elle n’en saurait sans doute pas plus. Il lui fallait continuer à fouiller.
Après une heure sans trouver de piste, elle se fit un thé, avant de se remettre à l’ouvrage.
L’odeur épicée du thé de Noël s’était mêlée à la caractéristique senteur des papiers vieillis.
Quand elle les trouva, son cœur fit un bond. Des lettres. Toutes contenues dans une pochette très élégante, qui ne correspondait pas tout à fait aux goûts de son grand-père. Elle l’avait connu plus sobre. Certes, c’était raffiné, mais l’étui avait un petit côté ostentatoire qui ne lui allait pas. Elle se mit à douter. Et si elle allait apprendre des choses qu’elle ne voulait pas savoir ? Qui allait briser ses illusions ? Elle n’en avait pourtant plus beaucoup. Les rocs sur lesquels elle s’était appuyée enfant, s’étaient bien vite brisés à peine sortie de l’enfance, et elle savait maintenant que personne n’était à l’abri de la chute.
Cette branche de la famille, la sienne, était jugée comme maudite. Trop de malheur pour si peu de personnes. Deuils, dépressions, morts, secrets. Des choses qui inconsciemment l’avaient rongée, et qui encore aujourd’hui l’empêchait d’avancer. Allait-elle s’écrouler si un peu plus de désillusion entrait dans sa vie ?
Elle se morigéna. Elle devait se raccrocher à la partie forte de sa personne. Celle dont les racines bien ancrées la faisaient tenir.
Elle ouvrit la pochette.
Mon amour, était-il écrit d’une écriture féminine.
Je ne sais si je pourrais encore tenir très longtemps à ce rythme. Ton absence est cruelle. Nous nous voyons chaque jour, passons des heures dans la même pièce, mais sans pouvoir clamer haut et fort le lien qui nous unit.
Je sais ce que tu dois abandonner pour penser à vivre avec moi, mais tu ne peux pas tout avoir… Si elle n’était pas là, ce serait plus simple évidemment…
Elle n’en lut pas plus, et regarda la signature. « Marie. » Elle parcourut rapidement les autres lettres, et y lut la preuve qui lui manquait. Ces lettres étaient bien adressées à son grand père. Qui était marié. Père.
Elle se colla un peu plus au mur, comme s’il allait la soutenir, et lança un regard de reproche à la photo de famille qui trônait sur le bureau. Sa grand-mère et son grand père souriants…
Pourquoi fallait-il que même les choses auxquelles elle avait cru le plus s’effondrent ? Si elle ne croyait plus depuis longtemps au couple de ses parents, elle avait toujours vu un modèle de perfection à n’approcher ne serait-ce qu’un peu chez ses grands-parents.  Elle ne pouvait s’empêcher d’être déçue.
Elle froissa la lettre, qu’elle envoya dans la corbeille. Une citation d’Homère lui revint en mémoire. « Laissons le passé être le passé. » 
Elle sortit de la pièce, qu’elle referma derrière elle. Demain, serait un autre jour.

samedi 27 août 2011

Les plumes de l'été 8




Quand vient la fin de l'été... Voilà, les plumes c'est fini jusqu'aux prochaines vacances. Cela va me manquer, même si je continuerais les ateliers et autres défis ( Lundi avec rendez vous avec un mot, mercredi avec mon feuilleton personnel dont vous pouvez lire le premier épisode , et avec sans doute l'atelier d'Olivia.)

Néanmoins aujourd'hui c'est le jour d'Asphodèle, et de nos plumes en H. Les mots n'étaient pas piqués des hannetons, une fois n'est pas coutume et la tache a été harassante. J'en ai sorti quelque chose qui est venu tout seul, parce que comme d'habitude j'ai été intuitive. Je dois apprendre à retravailler mes textes...


HÉSITER – HURLEMENT – HUMAIN – HÉLICOPTÈRE – HIRSUTE – HÉCATOMBE – HONNEUR – HONGROISE – HASCHISCH – HARMONIE – HUMBLE – HÉRISSON – HYPOTHÈSE – HUMILIATION – HANTER – HARIDELLE – HASARD – HYÉMAL (E) ou HIÉMAL(E) – HALO.


Il avait clairement mal lu son regard, et s’il avait été une plante hiémale, il se serait tout à fait senti à son aise dans le froid givré qui régna pendant la fin du repas. 
Il allait tenter de la dérider un peu en se lançant dans une hypothèse farfelue sur la proche fin du monde, sujet qu’il utilisait très régulièrement pour se sortir de silences embarrassants, quand une sonnerie stridente retentit.
Elle hésita un instant, contempla le nom qui s’affichait sur son portable.
-          "Tu ne réponds pas ?" Demanda-t-il avec curiosité.
-       "   Si."
Elle quitta la table pour se placer à la fenêtre, de sorte qu’il n’entendait pas ce que son interlocuteur pouvait bien lui dire. Le soleil était revenu, et dessinait un halo sur les cheveux de la jeune femme, qui semblait tout droit sortie d’une version revue et corrigée d’un tableau en clair-obscur. Elle tortillait une mèche de ses cheveux qu'elle avait enlevé au savant fouillis qu'était sa coiffure. Encore une particularité de plus, cette façon toute désuète d'arranger ses cheveux.
-          « Je me fous que tu doives t’occuper de ton haridelle hongroise.  Ce n’est pas parce que nous avons été fiancés brièvement que je suis devenue corvéable à merci. »
Il y eut un silence, pendant lequel la personne au bout du fil du essayer de se défendre, avant que les hurlements reprennent.
-«  Je ne sais pas quelle variété de haschisch tu as ramené de Hollande, mais tu ferais mieux la prochaine fois de plutôt penser à acheter des plants de tulipe à la place, ou du gouda. Ta mère aime ça. Je suis un humble être humain, Ryan, et il est hors de question que tu essayes de m’acheter à coups de culpabilisation. Je te rappelle que c’est toi qui m’a quittée. Il y a quelques années déjà… Et ce que tu m’as forcée à faire continuer de me hanter… » Un autre silence. « Et puis merde. Va au diable voir si j’y suis ! »
Elle revint à table, consciente de l’humiliation qu’elle venait de s’auto-infliger. Elle avait hurlé comme une bougresse devant cet homme séduisant, et sans doute annihilé toute possibilité de relation avec lui. Bien joué.
-          « Tu m’expliques ? Demanda-t-il en croquant comme si de rien était dans un biscuit. »
-          « Oh… Je ne suis pas sûre que ce soit particulièrement intéressant. » Elle rougit.
-          « Tu plaisantes ?  Je veux tout savoir de ce pauvre bougre qui vient de subir tes foudres… »
Après avoir hésité un long moment, elle se lança dans le récit de ces deux années étranges où elle avait été fiancée avec un aventurier, de ceux qui vous font faire des baptêmes de l’air en hélicoptère, des sauts en parachute, mais qui sont  assez tendres pour sauver des hérissons de la noyade.
« J’ai rencontré Ryan lors de ma première semaine de fac. Nous étions tous les deux dans le même cours d’anglais, et comme par hasard celui-ci avait été annulé. Comme j’étais coincée en ville jusqu’à ce que je puisse rentrer avec ma colocataire de l’époque, il m’avait invité à attendre chez lui, pour prendre un thé. J’étais particulièrement naïve en ce temps-là. Je n’y avait vu que de la gentillesse naturelle. Certes, je l’avais trouvé beau avec ces cheveux hirsutes, et j’avais jugé l’harmonie de ses cheveux bruns et de ses yeux verts du plus bel effet, mais j’étais surtout obnubilée par ma lecture du moment, et je lui avais demandé sans ambages si je pouvais lire tranquillement. J’avoue que c’était terriblement malpoli. Cela ne l’avait pas vexé du tout, bien au contraire, il devait m’avouer plus tard que c’était ce qui avait achevé de le séduire chez moi. Cette espèce d’impolitesse toute intellectuelle.
Il m’avait alors proposé de sortir avec lui, ce que j’avais décliné. Pourtant, il était du genre à créer des hécatombes de filles autour de son passage, et j’aurais dû penser que c’était un honneur qu’il me faisait. Mais non. Quelque chose me gênait chez lui au départ, et j’aurais dû garder ce sentiment et ne pas me laisser endormir… Enfin bref, j’ai fini par céder, nous avons couché ensemble, comme j’étais vierge il s’est senti flatté, un soir de saint valentin trop arrosé il m’a demandé en mariage, et nous avons été fiancés quelques temps. Jusqu’au jour où je l’ai retrouvé au lit avec la professeur d’anglais. Celle qui avait été absente ce fameux jour… J’ai pris mes cliques et mes claques, changé de fac, et depuis, je n’arrive pas à m’en débarrasser. Une histoire stupide non ? Néanmoins, il m’a fait vivre quelques aventures… »
Elle s’était levée pendant son récit et avait marché nerveusement de long en large dans la pièce, se demandant pourquoi elle lui racontait tout ça. Quel était donc le pouvoir qu’il possédait pour la faire sortir de son mutisme ? La fin de sa dernière phrase coïncida avec l’instant où elle passait près de lui. Il se leva, l’attrapa par la taille pour l’approcher de lui, et la regarda avec attention.
«  Qui êtes vous ? » Lui demanda t-il avec sérieux en essayant de lire en elle. D'attirance, il était passé à la fascination évidente. Il lui fallait cette femme. La décrypter, la comprendre. Peut être même l'aimer, si elle le laissait faire.
« Votre voisine… »Répondit-elle en déglutissant difficilement, trop consciente de leur évidente proximité.
"Après tout, je m’en fous." se dit-il avant de poser la main sur sa nuque et de l’embrasser.
Leur premier baiser avait le goût de ses promesses et elle oublia tout de suite sa colère. Il n’y avait plus que lui, et le goût amer du chocolat noir que dégageait sa langue encore chargée du dessert. Un avant goût de paradis

mercredi 24 août 2011

Le feuilleton du mercredi : Préambule.

 Avant de vous laisser avec le début de ce qui sera une saga sur les mercredis à venir pendant quelques temps, je pense, (sauf si vous me dites que c'est absolument cliché et que je ferais mieux de retourner à mes petits points au lieu de penser à écrire), je vous invite à aller lire la page dédiée au feuilleton du mercredi pour plus de précision. Et maintenant, voilà le début des aventures d'Elizabeth !
             
 Jour 1
     " Jeune femme de vingt-cinq ans cherche « colocataire ».
Dans une maison de 100m² en centre-ville avec petit jardinet, propose chambre + accès au parties communes et à une bibliothèque fournie. Loyer de 600 euros charges comprises. Possibilité de partager les frais de nourriture et accès au wifi. Phobique ou allergique aux chats ou aux livres s'abstenir. Non-fumeur ardemment recherchés. "

Voilà l’annonce stupide que j’ai passé il y a maintenant un mois et demi. Un peu avant que Margot ne me quitte… (pour habiter avec son fiancé, ce que je pardonne volontiers.)
Devant le vide béant qu’elle a laissé, elle qui était ma confidente, à son grand dam parfois, je le crains, j’ai décidé d’être diariste. Après tout, des gens très bien l’ont été. Voire même des hommes et des femmes de lettres. Tenez, George Sand par exemple ! Alors pourquoi, moi Elizabeth Tales, je ne pourrais pas écrire un journal ? Je vous le demande ?!

Cela m’occupera et m’évitera d’abreuver de messages, mails, et coups de téléphone mes pauvres amies qui n’ont pas mérité d’avoir une harceleuse du dimanche sur le dos. Je ne supporte pas la solitude. Elle m’affole, me donne le sentiment d'être la seule âme errante sur terre, et m'oblige à aller me réfugier sous la couette.  C’est sans doute pour ça que j’ai deux chats, respectivement nommés Wentworth et Darcy, et que je fais le doux métier de libraire. 
Mon petit ami, (diantre que cela sonne enfantin…) pense que je m’entête à conserver la librairie parce qu’elle m’a été léguée par mon père, qui la tenait de son père, qui lui-même… Un lieu familial. Alors certes, j’y tiens comme à la prunelle de mes yeux, mais c’est également parce que j’aime ce que je fais. Passionnément. Je ne me vois pas faire autre chose.
Enfant je ne voulais pas être princesse, archéologue, ou autres joyeusetés de ce genre. Je voulais soit être muse, soit épouse de châtelain. Néanmoins comme je n'ai ni trouvé d'artiste à inspirer, ni d'héritier de demeure ancestrale à subjuguer, je me cantonne à ce que je sais faire de mieux. Parler des livres. Ces voleurs de temps qui à l'aide de quelques mots vous attachent à eux jusqu'à ce que vous soyez définitivement perdus. Je les aide à perdre les gens un peu plus...
Etienne, comme l’on nommé de manière désuète ses parents, voudrait que je travaille dans la société de son père, sous prétexte que je suis une vendeuse née. Je me demande vraiment parfois si nous vivons sur la même planète lui et moi. C’est un vrai courant d’air, toujours entre New York et Paris, jet largué, mélangeant anglais et français. La plupart de mes amies, que dis-je, toutes mes amies, l’ont en sainte horreur, et me conjurent de le quitter . Ce que j'essaye de me résoudre à faire, parce qu'elles n'ont pas tort, mais à chaque fois, je me perds dans l’abîme de ses yeux, et je remets ça à plus tard. Et puis, l’amour c’est aussi apprécier les différences de l’autre non ? Du moins… Je crois.

Pour en revenir à la fameuse annonce, j’ai, depuis, vu défiler un nombre incalculable de ces gens qui me font me demander si je suis tout à fait normale. Des étudiants fêtards qui m’ont regardée de travers parce que j’ai dit que non, envisager de donner des fêtes tous les soirs n’était pas une bonne idée du tout, à une apprentie banquière qui m’a demandé à quoi me servaient tous ces vieux livres. La pièce les contenant aurait gagné, d'après elle, à être transformée en une chambre de plus, que j’aurais pu louer, ce qui m’aurait rapporté une autre source de revenus. Sans compter l’idiot qui m’a dit qu’il était dommage que la librairie ne soit pas un magasin de jeux vidéo. « Sérieux, y’a encore des gens qui lisent sur papier ? C’est juste trop relou. » A-t-il dit d’un grognement qui s’apparentait à une tentative de dialogue.
Je me fais l’effet d’une vieille rombière à écrire ces lignes. Vraiment.

Le lendemain.  
Jour 2.

A peine avais-je reposé mon stylo hier, parce que oui, j’écrirais ce journal sur un vieux carnet, et non pas sur mon ordinateur, au cas où un malandrin me le vole, je tiens à ma vie privée, bref, hier , j’ai trouvé un locataire.
Enfin, trouvé. Je me comprends. Disons que Margot m’a téléphoné et m’a suppliée d’accepter le cousin de Florian. Un dessinateur. Apparemment il a négligé de se trouver un nouvel appart et il doit rendre ses clés dans deux jours. Autant dire que c’est une situation d’urgence, et que je n’allais pas dire non. J’aurais préféré vivre avec une fille. Je n’aurais pas eu de scrupules à me balader en pyjama à pois ou en petit short et brassière, quand il fait trop chaud. Mais un locataire masculin implique d’être décente, sinon, il pourrait bien se croire harcelé sexuellement, on ne sait jamais.
D’après ce que m’a dit ma très chère amie, ce n’est pas vraiment un cadeau qu’ils me font. Elle a été honnête, c’est déjà ça. Il semble qu’il soit plus de la tendance brun ténébreux option mutisme que solaire, amical et rieur. Il ne deviendra sans doute pas le frère à qui je confierais mes peines en mangeant de la crème glacée. J’aime les clichés, dommage. Nous aurions pu aussi déguster des scones en buvant de l’earl grey, je ne suis pas difficile. Rien ne vaut un bon thé bu en observant la pluie tomber.

Apparemment, il s’appelle Louis. Oui, comme le vampire des chroniques d’Anne Rice. Cela m’étonnerait qu’il soit aussi désabusé de la vie que son homonyme de papier. Du moins, je l’espère.
Et puisqu’il arrive demain, je vais devoir m’adonner à l’activité la plus détestable du monde : faire le ménage ! Si je me tortille en passant l’aspirateur, je devrais au moins éliminer les quelques macarons que j’ai englouti. Ce qui n’était pas de ma faute. Allais-je les laisser dépérir dans une grande boite presque vide ? Je suis trop gentille, je n’y peux rien !

lundi 22 août 2011

Rendez vous avec un mot: Herboristerie

Quoi de mieux pour commencer la semaine qu'une petite récolte de textes? Je ne sais pas si elle sera très importante, certes, mais nous continuons l'aventure chaque lundi.
Cette semaine donc, il fallait écrire un texte autour du mot herboristerie.
Je peux d'ors et déjà vous encourager à lire le texte de 32Octobre, celui d'Aymeline également.
Le mot de la semaine prochaine est Passé. Il n'est pas très dur, vous pourrez vous en donner à coeur joie, je l'espère.

Quant à mon texte de cette semaine, j'ai repris l'héroïne des deux semaines dernières, et vous relate la rencontre qui a changé sa vie et forgé son destin. C'est la fin d'un livre, et ce qui mènera à un deuxième volume. Ce sont des aventures écrites il y a quelques années que je dois remanier à coup de serpe, mais j'avoue avoir du mal à toucher à mes petits chéris. (Oui, je m'attache très sottement à mes personnages...)

Trève de blablas, place au texte !



Quand il entra dans la boutique, bizarrement silencieuse malgré l’agitation qui régnait au dehors, il remarqua tout de suite les deux corps étendus au sol, une femme et un homme . L’odeur du sang se mêlait à  celle des herbes, omniprésente, qui lui rappelait sa forêt natale. Le métal épousant la nature. Il avait connu ce genre d’herboristerie chez lui, tenue par un de ces hommes sans âge qui semblent avoir toujours été dans le paysage. Il se souvenait que son frère aimait à venir dans cette échoppe, et qu’il l’y trainait bien malgré lui. Aauril avait aimé apprendre le nom de toutes les plantes, leur utilité, leur odeur et leur goût. Il avait appris à soigner par les infusions, décoctions, cataplasmes, avait réduit des fleurs en poudre, parfois même été malade pour connaître l’effet d’une nouvelle variété.  Tous les soirs ils buvaient ensemble un peu de tisane à la camomille, et il avait aimé regarder la fleur séchée croitre, s’emplir de l’eau qui petit à petit se colorait de jaune. Penser à ses bons moments en contemplant le corps sans vie de ces gens, dont il savait pourtant qu’ils étaient des ennemis, et sans doute dangereux, lui apparaissait comme une sinistre farce. Arriveraient-ils, tous autant qu’ils étaient, à se remettre des horreurs qu’ils devaient connaître pour espérer un futur clément ?

Il souleva le couvercle d’un bocal de faïence blanche et bleue, sans étiquette.  Des feuilles de noisetiers à priori. Il croyait se souvenir qu’on les utilisait contre certaines inflammations. Il poussa un soupir et allait sortir du magasin quand il entendit un reniflement discret, provenant d’un placard.

Quand il l’ouvrit, il découvrit une petite fille recroquevillée sur elle-même, pleurant toutes les larmes de son corps et serrant contre sa joue une poupée de chiffon.

Il eut un moment d’hésitation, et revit le ventre arrondi de celle qui allait bientôt lui donner un enfant. Une fille. Non, il ne pouvait pas. Il sortit un mouchoir de sa poche et le tendit à la gamine, qui s’arrêta un moment, et le regarda avec intensité. Elle était particulièrement jolie avec ses boucles blondes et ses yeux clairs.

_Comment t’appelles-tu ? Lui demanda t-il avec gentillesse.

_Elaë.

_ Ecoute moi bien Elaë, lui dit-il avec tout le sérieux dont il était capable. Tu ne dois sous aucun prétexte sortir d’ici d’accord ? Il faut que tu attendes, même si tu as faim, si tu as peur, ou que tu entends du bruit. Attends longtemps. Je vais te cacher un peu mieux d’accord ?

Il disposa quelques piles de tissus réservés aux cataplasmes devant elle, et elle disparut bientôt de sa vue.

_ Et toi, entendit-il, comment t’appelles-tu ?

_Earlim. Il eut un sourire désolé. Il savait qu’il se montrait égoïste en l’épargnant. Bientôt, elle serait totalement seule. Et que ferait-elle ? Saurait-elle se débrouiller, survivre ? Sans doute que non. Elle n’allait pas manger des plantes séchées… Néanmoins, il ne put se résoudre à commettre l’irréparable.

Il sortit de la boutique en murmurant un adieu.

Dans sa cachette la petite serra un peu plus fort sa poupée remplie d’herbes odorantes. Sa mère, qui connaissait si bien le secret des plantes, lui avait confectionné pour calmer ses peurs d’enfant. L’odeur douce et fleurie qui s’en échappait procurait un sentiment léger d’apaisement. D’habitude, cela suffisait.

Mais aujourd’hui…

(Pour Asphodèle les liens des premiers rendez vous avec un mot qui parlaient déjà de cette héroïne, : Elaë 1 , Elaë 2,) (je précise néanmoins que ce sont des bribes d'une histoire longue qui tient sur au moins deux tomes...)

samedi 20 août 2011

Les plumes de l'été 7

Septième participation au jeu de notre amie Asphodèle.

 Dire que j'ai eu du mal cette semaine serait un grave euphémisme ! J'ai galéré oui ! (pour continuer la gamme des g... ) Du coup, ça n'avance guère, voire ça stagne mon histoire, mais bon, prenons notre temps lentement, pour que les personnages arrivent à maturation ! L'écriture, c'est comme la cuisine, une histoire doit mijoter ! Place aux mots, et au texte :)


 GIRAUMON – GAMBADER – GARAGE – GIVRE – GARGOUILLE – GAMBIT – GALOP – GABARIT – GLORIOLE – GALIPETTE (S) – GALLINACÉ – GRILLE – GLAND – GROTESQUE – GEMIR – GOURMAND – GODILLOT – GRAVE – GRILLON – GALIMATIAS – GIROFLE – GARAMOND* .

Dehors, le tonnerre faisait entendre sa gamme de sons graves, et le vent gémissait en une lourde plainte macabre.  Alors qu’il était retourné dans la cuisine pour préparer le dessert, elle gémit du grotesque de la situation. Elle avait l’impression tout à coup que sa raison, son cœur et son corps lui demandaient des choses différentes, et elle passait de l’envie de faire des galipettes à celle de partir au galop, et de mettre fin à cette tension insupportable. Une odeur de clou de girofle lui vint aux narines, et poussée par la curiosité du gourmand, elle risqua un pied dans l’antre du chef.  Elle n’avait pas encore vu la pièce en entier, se contentant de l’apercevoir par le petit encadrement du passe plat.
Parcourant des yeux le spectacle, elle admira les madeleines parfaites qui reposaient sur une grille, et jugea une fois de plus, que la décoration était à son goût. Quelques cucurbitacées trônaient dans une coupe, avec sur le dessous un très joli giraumon comme elle n’en avait pas vu depuis longtemps. Sur le frigo, des menus décorés de glands et tapés dans une police garamond, était retenus par des magnets en forme de gallinacées.  Elle qui n’avait aucun sens de l’organisation dans sa cuisine, admira cette méthode presque chirurgicale, et eut tout à coup l’impression d’être une paysanne en godillots dans la salle à manger d’un château, alors que marquis et duchesse dînent avec raffinement.
« Te voilà figée comme une gargouille » Lui dit-il en se tournant vers elle. « Moi qui croyait que tu venais m’admirer dans toute ma gloriole, te voilà pâle comme le givre. Serais-tu finalement une dame des neiges échappée d’un conte ? »
« Quel galimatias… » Soupira-t-elle, un peu agacée d’être prise en faute. « Non, je trouvais juste que le service se faisait lent. Mais je te laisse, je vais retourner chez Andersen… »
Elle sortit de la pièce en gambadant, bizarrement euphorique.
Il n’avait rien répondu, jugeant que son silence était pareil à un gambit au jeu d’échec, il lui fallait prendre son temps, amadouer, laisser le sentiment de victoire.  Pourtant, le petit grillon qu’elle lui avait semblé être se révélait être d’un tout autre gabarit. Plutôt une lionne finalement, définitivement féline en tout cas, et certainement pas si innocente.
Pouvait-il être sur une voie de garage avec elle ? Le regard enflammé qu’elle lui lança quand il revint avec les desserts lui fit penser le contraire. Peut-être y aurait-il une cerise sur le gâteau aujourd’hui.


(pour les retardataires, les débuts de l'histoire sont sur mon autre blog ici.)

jeudi 18 août 2011

Welcome !

Pourquoi un blog consacré  à l'écriture? 
Pourquoi ne pas continuer dans mon coin?
Oui, pourquoi?

Pour pas mal de raisons. Déjà parce que j'aimerais donner un peu plus d'importance à l'écriture dans ma vie, et que je ne veux pas envahir mon blog littéraire. J'aime bien compartimenter. Ranger dans des dossiers, classer, organiser. Je suis une bordélique, sauf sur internet et sur l'ordinateur, allez savoir pourquoi !
En outre, pour mûrir, m'améliorer, il me semble utile d'être lue. D'avoir des conseils, des critiques (constructives...), d'échanger, de parler, d'avoir d'autres points de vue, de faire des exercices. Après tout, internet est formidable pour ça non?
Et puis, je n'aime pas rester dans mon coin. Je suis une grande solitaire qui en réalité déteste ça. Alors pour éviter de harceler les gens qui me connaissent et me supportent tous les jours, je viens chercher des victimes volontaires et consentantes ici.

Sur ce blog il y aura plusieurs rendez vous hebdomadaires. Rendez vous avec un mot, le lundi, durant le temps de l'été et peut être plus longtemps si ça continue, les plumes de l'été, le samedi, et en cours de semaine, sans doute le mercredi, un texte qui se suivra et qui au final formera une histoire. Je ne sais pas encore lequel de mes débuts de roman choisir, aussi, si vous avez des envies particulières, n'hésitez pas à m'en faire part.

Je déclare ce blog officiellement ouvert ! Champagne :p