10 septembre. Elizabeth.
Est-ce que ce sont mes excuses sous forme alimentaire qui ont transformé à ce point Louis ? Depuis quelques jours, il est aimable, même s’il reste d’une discrétion exemplaire, il parsème ça et là de petites attentions qui me vont droit au cœur. Chaque matin quand je me lève, le café est préparé et chaud. Je n’ai plus à sortir les poubelles, où à me soucier des feuilles qui tombent dans le jardin. Il s’est arrangé pour faire une séance de dédicaces la semaine prochaine à la librairie. A côté de ça, il ne parle toujours pas. Il a toujours un air mélancolique plaqué sur son visage, comme s’il cachait quelque chose. Je croise parfois son regard, gris comme une mer déchaînée, et j’y lis les mêmes failles que les miennes. Qu’a-t-il vécu, lui ? Il n’est finalement pas sans âme, comme je l’avais cru au départ. Encore un reflet de ma pauvre capacité à juger les gens.
En ce moment, je fais les choses de manière automatique. Comme un pantin sans âme. Je continue à fuir Hugo, et je me retiens de lui crier ses quatre vérités. Le voir ne pas abandonner, ne me flatte pas, et me fait souffrir. Voir son visage si exempt de souffrance me rappelle une époque où j’étais entièrement heureuse. J’étais tellement naïve alors. Je croyais à un futur sans nuages, et je n’avais peur de rien. Je donnerais n’importe quoi pour être de nouveau à cette époque. Tout était parfait alors. A-t-on un quota de bonheur ? Nous est-il retiré si on l’a utilisé trop vite ? Je ne me sens à ma place, désormais, que quand je lis. Alors, mon esprit est apaisé. Dans la bibliothèque de mon père, j’ai l’impression d’être reliée à lui, brièvement, et j’en oublie qu’il ne va pas s’asseoir en face de moi, en me demandant, souriant, si ce que je lis me plait. Me dire que plus jamais nous ne parlerons ensemble de nos héros de papier, me fend le cœur. J’ai beau me dire, depuis des années, qu’être triste ne le ramènera pas, que cela ne sert à rien, j’ai dans le cœur un écho qui répercute à l’infini son nom. Et dans l’obscurité de ma chambre, je la hais. Cette femme à qui je dois la naissance, mais à qui je dois aussi la mort de l’être que j’aimais le plus.
Ce nouvel épisode est très intéressant, on s'attache de plus en plus à Elizabeth qui devient un personnage complexe et très réel
RépondreSupprimerLa réalité se rapproche de la fiction, c'est bien croqué ! Mais je pense sincèrement que notre quota de bonheur est inépuisable, il faut attendre qu'il se renouvelle, comme tout, il prend d'autres formes, d'autres visages et on l'on s'étonne toujours de notre capacité d'oubli avec le temps... Même si certaines choses restent à jamais gravées dans nos coeurs, le bonheur revient un jour frapper à la porte et souvent quand on ne l'attendait pas ! :)
RépondreSupprimerTu arrives à mener de front plusieurs feuilletons, il faut faire un peu de gym intellectuelle. Un bel exercice que je découvre avec plaisir.
RépondreSupprimerCa nous promet une belle danse, lundi !
Bises de Lyon
Je crois qu'on a un quota de base de bonheur mais suivant les personnes, ce quota reste inépuisé ou au contraire s'épuise rapidement.
RépondreSupprimerMais je crois que tes personnages n'ont pas épuisé le leur....je l'espère de tout coeur...
Bravo d'être là chaque semaine avec la suite de l'histoire...j'apprécie cet exercice.
Aymeline : Ah, si elle fait réelle c'est le plus beau compliment que tu pouvais me faire !
RépondreSupprimerAsphodèle : Oui, je suis tout à fait d'accord. Et puis le bonheur a tellement de formes multiples !
Soène : Je ne les écris pas le même jour, du coup ça va, je gère ^^
Mind the gap : Je pense qu'ils sauront trouver un peu de bonheur, comment, on verra ^^